La compagnie finlandaise d’électricité Teollisuden Voima (TVO) vient de confirmer que le démarrage du réacteur nucléaire finlandais qu’Areva est en train de construire sur le site d’Olkiluoto n’aura lieu qu’en 2012, donc avec trois ans de retard, ce qui ferait grimper le coût total du projet de 50%. Selon Greenpeace, à l’heure où la crise financière mondiale bat son plein et alors que les crédits se font rares, les clients potentiels d’Areva doivent tirer la leçon du fiasco finlandais: investir dans le nucléaire et en particulier sur l’EPR est extrêmement risqué.


24.06.2008 Olkiluoto/Finlande: Un dirigeable Greenpeace dénonce la construction de l’EPR. ©Greenpeace/Aslund (Archives)

«L’EPR finlandais prouve l’inefficacité du
nucléaire dans la lutte contre les changements climatiques. La
Finlande doit se mordre les doigts d’avoir misé sur l’EPR pour
tenir les engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto,
déclare Frédéric Marillier, responsable de la campagne Énergie à
Greenpeace France. Voilà beaucoup de temps et d’argent de perdus,
qui auraient pu être investis dans la mise en œuvre d’une vraie
politique alternative d’efficacité énergétique et d’économies
d’énergie, et dans le développement massif des renouvelables.»

Le chantier finlandais, entamé en octobre 2005,
accuse désormais trois ans de retard, source de dérapages
budgétaires importants. En août, suite à l’annonce par Areva d’une
nouvelle provision inscrite sur ce chantier en raison de surcoûts
pour tenir le calendrier et de difficultés des sous-traitants, le
quotidien Les Échos révélait que la facture de l’EPR finlandais
enregistrait une augmentation de 50%. Coût global du projet: 6,7
milliards de francs suisses, pour un prix initial de 3
milliards.

Par ailleurs, pour la vente de l’EPR en
Finlande, Areva a obtenu de l’État français une garantie à
l’exportation record de 900 millions de francs suisses, via
l’Agence française de crédit à l’exportation (Coface). Grâce à
cette coquette somme, Areva a pu proposer à son client, TVO, un
contrat à prix fixe, très intéressant puisqu’il élimine tout risque
économique pour l’acheteur. En clair, cela signifie qu’Areva paiera
tous les surcoûts de sa poche. Sachant qu’en plus des dérapages
budgétaires, le géant du nucléaire va devoir verser à TVO des
pénalités de retard, estimées à 3,3 milliards de francs suisses par
le magazine Capital en mai dernier… Pour mémoire, 80% du capital
d’Areva sont détenus par le Commissariat à l’énergie atomique
(CEA), une structure publique de l’État français. Qui va donc
éponger cette astronomique facture? Les contribuables français?

Pour rester dans les clous des engagements de
réduction de ses émissions de gaz à effet de serre contractés dans
le cadre du protocole de Kyoto, la Finlande va devoir investir
beaucoup plus que prévu dans les crédits carbone. Dans la nouvelle
version du plan national d’allocation des crédits carbone, le
gouvernement finlandais a augmenté la dotation totale de 13Mtonnes
de CO2 pour le secteur de la production d’énergie.

Comble du fiasco, la compagnie Fortum – un des
principaux actionnaires de TVO et future « bénéficiaire » de
l’électricité de l’EPR – a annoncé que, du fait du retard du
chantier à Olkiluoto, elle allait construire une centrale à fioul
de 250 à 300MW pour compenser le manque à venir d’électricité en
2009. Les citoyens devront mettre la main au porte-monnaie: selon
une étude réalisée par l’industrie lourde finlandaise, le retard de
l’EPR devrait coûter aux consommateurs d’électricité 4,5 milliards
de francs suisses.