Lundi 7 décembre, à 7h20, Yannick Rousselet, responsable de la campagne Énergie/Nucléaire de Greenpeace France, a été délogé par les forces de l’ordre de la voie ferrée sur laquelle il s’était enchaîné la veille au soir. Son objectif était d’empêcher l’arrivée d’un train attendu à Cherbourg et chargé de déchets nucléaires, qui devaient ensuite être transférés en Russie.


Greenpeace reste déterminée à empêcher la poursuite des exportations de déchets nucléaires vers la Russie. ©Greenpeace

Par cette action, Greenpeace tenait à montrer
son opposition à la reprise de ce trafic et à le mettre en lumière.
Nous dénonçons d’autant plus ce trafic que nous publions des
chiffres qui prouvent que ces déchets sont abandonnés en Russie et
qu’ils n’y sont pas transformés comme le prétendent l’Etat et
Areva.

Une fois notre responsable de campagne évacué, ce sale trafic a
pu reprendre. Comme prévu, les déchets ont été transbordés sur le
Kapitan Lus, un navire russe qui a quitté Cherbourg le mardi 8 en
direction de St-Petersbourg. Il y arrivera le 14 décembre.

Pour mieux comprendre les enjeux de ce transport et de notre
action, il faut les replacer dans le contexte d’une série
d’incidents, de révélations et de rapports officiels qui a montré
depuis le début le mois d’octobre l’opacité dans laquelle travaille
le lobby nucléaire français et le manque de sécurité de la
filière.

Début octobre, il est devenu de notoriété publique que la France
exportait des déchets nucléaires vers la Russie, sans se soucier de
leur  devenir.  Contrairement à ce que prétendait Areva, ces
déchets n’y sont ni transformés, ni réutilisés. Ils sont presque
systématiquement laissés sur place, abandonnés.

Quelques jours plus tard, nouveau scandale. Plusieurs dizaines
de kilos de plutonium ont été ‘oubliés’ sur le site nucléaire de
Cadarache, dans le sud de la France. Face à ces révélations, le
ministre de l’Environnement, Jean-Louis Borloo, saisit le « Haut
comité pour la transparence et l’information sur la sûreté
nucléaire ». Il lui demande un inventaire global des matières et
déchets produits au cours du cycle du combustible nucléaire. Les
conclusions sont attendues pour janvier.

Dans le même temps, un moratoire est respecté de fait sur les
exportations de déchets nucléaires français vers la Russie. Depuis
la mi-octobre, aucun navire chargé de ces déchets n’a en effet
quitté la France pour la Russie. Les 5’000 signatures que nous
avons collectées en faveur de ce moratoire ne sont peut-être pas
étrangères à cet arrêt du trafic. Tout comme la présence de nos
navires au Havre et à Cherbourg. Mais il semble que les pouvoirs
publics et le lobby nucléaire aient pris la décision de rompre ce
moratoire et de reprendre les exportations de déchets nucléaires
vers la Russie.

Greenpeace est déterminée à imposer un moratoire sur les
exportations de déchets vers la Russie, au moins le temps que les
enquêtes commanditées par Jean-Louis Borloo aboutissent. Nous
sommes d’autant plus déterminés à bloquer ce trafic que nous avons
pris connaissance d’un rapport du « Service de défense de sécurité
et d’intelligence économique », qui a été rédigé à la demande du
Haut comité sur la transparence et l’information sur la sûreté
nucléaire . Selon ce rapport officiel, depuis 2006, 33’000 tonnes
d’uranium ont été exportés vers la Russie (dont 23’540 tonnes
d’uranium appauvri) et seulement 3’090 tonnes ont été réexpédiées
en France. Les déchets nucléaires sont bel et bien abandonnés en
Russie!

Ce lundi 7 décembre s’ouvre le sommet de Copenhague pour lequel
Greenpeace est très mobilisée et qui concentre toute l’attention
des médias. Est-ce un hasard si Areva, forcée par Greenpeace depuis
deux mois d’interrompre ses transports de déchets nucléaires vers
la Russie, a choisi cette date pour reprendre son trafic?

En tout cas, si Areva tablait sur un relâchement de notre
vigilance, elle s’est trompée. Nous ne laisserons pas le lobby
nucléaire reprendre son sale business. Nous sommes là pour l’en
empêcher. La protection du climat et la dénonciation du nucléaire
sont un seul et même combat. A Copenhague, comme à Cherbourg.