Malgré sa promesse, le premier producteur d’huile de palme en Indonésie a choisi de poursuivre la destruction des forêts tropicales et des tourbières profondes sur l’île de Bornéo. Sinar Mas, via sa filiale Smart, spécialisée dans l’huile de palme, a continué à déboiser des forêts à haute valeur de conservation en dépit de son engagement d’y mettre fin au 1er juillet.


01.08.2009 (Province de Riau/Indonésie) Sinar Mas doit s’engager de manière transparente et changer de cap. ©Greenpeace/Anggoro

Les ambitions de Sinar Mas concernent l’expansion de son empire de l’huile de palme et de la pâte à papier sur des millions d’hectares supplémentaires en Indonésie, y compris au sein de vastes massifs forestiers et de tourbières de la province de Papouasie (partie occidentale de l’île de Nouvelle-Guinée). Ces projets de développement sont mis en avant dans des documents confidentiels de Sinar Mas que Greenpeace s’est procurés.

Sinar Mas prétend ne pas développer ses activités sur les tourbières et protéger les forêts « à haute valeur de conservation ». Depuis un premier rapport paru en 2007, les recherches menées par Greenpeace ces dernières années ont montré à plusieurs reprises que les pratiques du groupe entraînaient la destruction de zones de forêts de tourbières, notamment des zones d’habitat de tigres et d’orangs-outans.

Les nouveaux éléments publiés aujourd’hui par Greenpeace mettent en évidence les activités destructrices de Sinar Mas sur deux de ses concessions situées sur l’île de Bornéo: PT Agrolestari Mandiri et PT Bangun Nusa Mandiri, district de Ketapang, Kalimantan occidental.

Dans le premier cas, un document confidentiel de Sinar Mas révèle que près d’un tiers de la concession est constitué de tourbières, et que la plupart de ces tourbières ont une profondeur supérieure à trois mètres. Or conformément à la loi indonésienne, il est interdit de déboiser des tourbières aussi profondes. Sur les photographies prises par Greenpeace, on peut voir des agents de la compagnie en train de détruire une zone de tourbières. Dans le second cas, les photographies de Greenpeace montrent le déboisement récent de zones forestières qui, comme l’affirme une étude du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), servent d’habitat aux orangs-outans.

Dans les deux cas, les clichés ont été pris par un photographe de Greenpeace, accompagné de journalistes issus d’agences de presse reconnues: Reuters, AFP et Kompas. A l’aune de ces dernières révélations, Greenpeace demande à Sinar Mas d’assumer ses actes et de publier la carte de l’ensemble de ses possessions foncières, afin d’analyser quelles sont les zones particulièrement importantes pour la préservation du climat et de la biodiversité – et de savoir ce que fait exactement Sinar Mas sur ces zones…

Sinar Mas a été pris la main dans le sac, en train de détruire des forêts tropicales d’une valeur inestimable, et de fouler aux pieds les maigres promesses qu’il avait faites, lorsqu’il s’était engagé à changer d’attitude. Si nous voulons que les forêts indonésiennes puissent subsister, les activités de groupe Sinar Mas doivent être maîtrisées.

Ces preuves accablantes sont publiées le jour même où le groupe Sinar Mas devait rendre public un audit (qu’il a commissionné lui-même) sur ses activités dans quelques unes de ses concessions de palmiers à huile. L’objectif de l’audit n’est pas d’évaluer les pratiques du groupe à travers l’ensemble de ses activités, mais plutôt d’examiner les accusations portées par Greenpeace au cours de ces dernières années. Le cabinet de relations publiques Bell Pottinger, chargé de la communication du groupe, a été contraint d’annoncer cette semaine le report de la publication des résultats de l’audit. Notons que ce cabinet représente également les intérêts du pétrolier Trafigura, condamné la semaine dernière pour transporté illégalement des déchets toxiques en Afrique.

Au cours des derniers mois, plusieurs multinationales de premier plan – notamment Unilever, Kraft et Nestlé – ont réagi suite aux preuves apportées par Greenpeace en mettant fin à leurs contrats avec Sinar Mas. Toutefois, Greenpeace appelle d’autres groupes, et notamment le géant du négoce Cargill, à agir rapidement pour que la destruction de l’huile de palme ne fasse plus partie de leur processus d’approvisionnement.