Greenpeace France a rendu public aujourd’hui un rapport mettant en lumière l’explosion des coûts de la filière nucléaire en cas de prolongation de la durée de vie des centrales de l ‘Hexagone au-delà des 40 ans. Greenpeace s’est intéressée au coût futur de production de l’électricité nucléaire si les réacteurs anciens étaient rénovés dans des conditions de sûreté proches de celles de l’EPR, et a comparé ce coût à celui des énergies renouvelables.


Le coût de l’électricité produite par des centrales de type EPR est moins compétitif que celle issue des énergies renouvelables. ©Greenpeace/Gleizes

L’étude démontre que le coût de l’électricité nucléaire atteindrait CHF 160.-/MWh et dépasserait les coûts de production des principales énergies renouvelables. Ce dépassement serait effectif dès aujourd’hui pour l’éolien terrestre (coût compris entre CHF 48.- et CHF 96.-/MWh), et le serait dès 2018 pour le solaire, et à partir de 2020 pour l’éolien maritime. Quant au coût de production par des nouvelles centrales de type EPR, il est lui aussi moins compétitif que les énergies renouvelables (CHF 114.-/MWh). Le remplacement du nucléaire ancien par des réacteurs nouveaux type EPR n’apporterait pas les mêmes avantages sur les coûts de production que les renouvelables.


©Greenpeace

Les conclusions de l’analyse menée par Greenpeace sont claires: pour que le nucléaire reste moins cher que les énergies renouvelables à court terme, il faudrait le prolonger en bradant la sûreté, pourtant mise en exergue par les industriels et les États depuis le déclenchement de la catastrophe nucléaire de Fukushima.

Ce mardi 10 juin, soit deux jours avant la publication du rapport de Greenpeace, une commission d’enquête parlementaire a remis au président de l’Assemblée Nationale un rapport sur les coûts de la filière nucléaire. La création de cette « Commission d’enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d’exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l’électricité nucléaire”, dont le président est François Brottes et le rapporteur Denis Baupin avait été décidée le 11 décembre par l’Assemblée Nationale.

La principale question soulevée par les députés dans ce rapport est celle de la gouvernance du nucléaire. L’État est instamment prié d’assumer  ses responsabilités en prenant en main l’avenir du parc électronucléaire français et en levant certaines incertitude. Les travaux de cette commission confirment les risques économiques et les incertitudes liés à la prolongation du nucléaire en France.

Après la Cour des comptes qui a rendu public, mardi 27 mai, un rapport sur les coûts de la filière nucléaire, soulignant l’envol de la facture nucléaire, la commission Brottes / Baupin se dit préoccupée par une forme de dérive financière de la filière électro-nucléaire : coût d’exploitation, mur d’investissement, amélioration de la sûreté, érosion de la rentabilité, coût croissant de l’EPR.

En effet: suivre la stratégie proposée par EDF, à savoir exploiter les réacteurs au-delà de 40 ans, coûtera très cher: 5,3 milliards de francs suisses par réacteur, selon une étude publiée par le cabinet Wise-Paris en février 2014, soit 4 fois plus cher qu’annoncé par EDF.

Avec plus de deux ans de retard sur le calendrier défendu par le candidat François Hollande pendant sa campagne présidentielle, et après moult incertitudes, annonces, reports et autres couacs ministériels, Ségolène Royal doit présenter, le 18 juin prochain, les grandes lignes du projet de loi sur la transition énergétique. Le bon sens économique et environnemental voudrait que le gouvernement plafonne à 40 ans maximum la durée d’exploitation des réacteurs nucléaires. Sans décision claire sur ce point, comme l’a souligné la Cour des comptes, l’État laisserait EDF imposer aux Français sa coûteuse obstination pour le nucléaire.