Ségolène Royal présente ce matin en conseil des ministres les grandes lignes de la loi sur la transition énergétique. Les points les plus significatifs sont déjà connus. On note un grand absent : le nucléaire. Sur le sujet, rien de plus que le rappel de la promesse électorale de François Hollande d’abaisser la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 à 50%.


Action à la centrale de Tricastin. ©Greenpeace/Patault (Archives)

« Si le projet de loi reste tel qu’annoncé, soit sans limite d’âge pour les réacteurs nucléaires ni mécanisme de fermeture, la transition énergétique promise n’aura pas lieu », analyse Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France. « En se fixant uniquement des objectifs sans mettre en place les outils pour les atteindre, le gouvernement laisse clairement la main à EDF sur les décisions énergétiques. Cela donne le ton et l’ambition pour la COP 2015 de Paris. »

Dans ce projet de loi, il manque l’essentiel: la limitation à 40 ans de la durée de fonctionnement des réacteurs nucléaires et la mise en place d’un mécanisme permettant à l’État de décider de la fermeture de réacteurs pour des raisons de pilotage du mix énergétique. Ne pas ajouter à la possibilité qu’a aujourd’hui l’ASN de fermer des réacteurs pour des raisons de sûreté, celle d’un mécanisme de fermeture aux mains de l’État, pour des raisons de pilotage de la transition énergétique, laisse à EDF les clés de la politique énergétique.

Sur les objectifs de développement des énergies renouvelables en France et de réduction des émissions de CO2, ceux-ci sont clairement décevants à l’image des positions prises par l’Hexagone au sein des négociations européennes en cours sur ces sujets. Pour être un leader européen, la France aurait dû pousser un objectif de 45% de renouvelables d’ici à 2030 dans le mix énergétique français, alors que dans le projet de loi aujourd’hui l’objectif est de 32%. C’est un mauvais signal qu’envoie une nouvelle fois la France à ses partenaires diplomatiques alors que notre pays s’apprête à accueillir la COP en 2015.

Les centrales nucléaires françaises sont vieillissantes et approchent de leur durée de fonctionnement maximum. Des études récentes ont montré que leur prolongation au-delà des 40 années de fonctionnement pourrait coûter aux alentours de 4,4 milliards d’euros par réacteur (http://act.gp/1epO7qV), ce qui rendrait le nucléaire définitivement moins compétitif que les énergies renouvelables (http://act.gp/couts-nuke).

Or comme l’a récemment rappelé la Cour des comptes, nous sommes au pied du mur et ne rien décider aujourd’hui c’est décider d’étendre la durée de fonctionnement des réacteurs nucléaires. C’est donc imposer aux Français les coûts et les risques inhérents, au détriment de la transition et des bénéfices économiques et sociaux qui y seraient associés.

Nous savons maintenant qui décide de la politique énergétique en France. Le 10 juillet 2013, Greenpeace publiait le premier volet de son enquête sur les décideurs de l’énergie en France et posait la question: politique énergétique, qui tire les ficelles? https://www.greenpeace.ch.fr/qui/ Aujourd’hui, la question ne se pose plus. C’est bien EDF. Déclarations d’Henri Proglio lors du colloque de l’Union française de l’électricité du 17 juin 2014, à propos du projet de loi:
« On a beaucoup travaillé en commun avec le gouvernement et les administrations compétentes. On a eu la possibilité d’émettre un certain nombre d’idées, de préoccupations. […] Je ne le sens pas mal. Je n’ai pas de raison de douter une demi-seconde du fait que ce texte devrait aller dans le sens de l’intérêt du pays et donc nous convenir parfaitement. »