La semaine dernière, la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie (CEATE-N), votait une proposition selon laquelle les centrales nucléaires suisses pourraient continuer de fonctionner bien au-delà de leur durée de service initialement prévue. Une annonce faite discrètement mardi soir, afin de ne pas trop attirer l’attention sur le fait que la Suisse connaît une situation unique avec ses centrales nucléaires qui sont les plus anciennes en activité sur la planète. D’ailleurs, nous fêtons aujourd’hui un record du monde: les 45 ans d’activité du réacteur n°1 de la centrale de Beznau.


05.03.2014: Une centaine de militants Greenpeace occupait la centrale de Beaznau pour protester contre la durée de son exploitation. ©Greenpeace/Balzani-Lööv

A ce sujet, Dieter Majer, responsable de la sécurité nucléaire pour le ministère de l’environnement en Allemagne pendant plus de 20 ans, déclarait au journal Blick: « Il n’y a là aucun prétexte à se réjouir ou à célébrer. Cette centrale n’est pas sûre et doit être mise à l’arrêt le plus rapidement possible. » Ses critiques ne laissent que peu de place au doute: « Plus un réacteur vieillit, moins il est sûr, car ses composants s’usent avec les années et le risque d’une défaillance augmente. Les études montrent qu’après 40 ans de service, ce risque augmente de façon significative ».

Le politique ne prend pas aux sérieux les risques dénoncés par M. Majer. Le Parlement se montre incapable de fixer une date butoir contraignantes pour l’arrêt des centrales nucléaires. « On joue à la roulette russe », déclarait le conseiller national Christian van Singer, vice-président de l’Alliance « Non au nucléaire » au quotidien Le Matin.  

En Suisse, les exploitants des centrales nucléaires continuent d’affirmer que même leurs plus vieilles installations sont régulièrement rénovées,  qu’elles disposent des technologies les plus avancées et que leur niveau de sécurité serait similaire aux centrales plus récentes. Ces déclarations sont fausses. Les déficits de sécurité et les faiblesses conceptuelles  demeurent. Pire, les rééquipements demandés par l’Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN) ne résultent pas d’une comparaison systématique avec les exigences de sécurité actuelles et l’état des connaissances et de la technique. Généralement, le critère pour décider de la réalisation d’une mesure est simplement sa faisabilité dans une installation obsolète.

Cette situation bloque également l’essor des nouvelles énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. Une transition énergétique qui permettrait non seulement de réduire à zéro le danger nucléaire pour la population d’ici à 2024, mais qui permettrait également  la création de nombreux emplois et rendrait la Suisse indépendante de l’étranger pour son approvisionnement en électricité. Heureusement, rien n’est encore joué, la proposition de la CEATE-N sera discutée au Parlement en décembre prochain.