Une large coalition a lancé aujourd’hui à Berne une initiative pour des multinationales responsables. Elle veut garantir que les sociétés domiciliées en Suisse font face à leurs responsabilités lorsque leurs activités à l’étranger menacent les droits humains et l’environnement. La récolte des signatures démarre aujourd’hui.

Un matin d’août 2006, des dizaines de milliers de personnes d’Abidjan en Côte d’Ivoire se sont soudainement senties malades. Elles souffraient de nausées, de maux de tête, de difficultés respiratoires, d’irritation des yeux et de sensation de brûlure. Elles étaient terrifiées car elles ne savaient pas ce qui se passait. Durant la nuit, la compagnie suisse Trafigura avait déversé des déchets toxiques depuis le cargo Probo Koala. L’entreprise n’a jamais été inculpée pour avoir participé à ce cauchemar.

Autre exemple: en mai 2011, les forces de sécurité ont commis des violations graves des droits de l’homme envers la population civile en République démocratique du Congo. Un groupe suisse y avait également participé.

Ce ne sont malheureusement pas des cas isolés. Conditions de travail déplorables dans les usines textiles en Asie ou en Europe de l’Est, travail des enfants dans la production de cacao en Afrique de l’Ouest, émissions mortelles de dioxyde de soufre en Zambie: des sociétés suisses sont aussi impliquées dans ces scandales.

La Suisse figure à la 9e place des pays les plus fréquemment concernés par des violations des droits humains commises par des entreprises. Même si de tels cas font régulièrement la une des médias, le Conseil fédéral et le Parlement refusent d’agir. En mars, le Parlement a ainsi rejeté de justesse une motion visant à renforcer la responsabilité des entreprises à l’égard de leurs activités à l’étranger.

Seule une forte pression de la société civile pourra imposer des règles contraignantes. C’est pourquoi une large coalition d’organisations y compris Greenpeace Suisse – lance aujourd’hui une initiative populaire. Elle soumettrait les sociétés domiciliées en Suisse à un devoir de diligence en matières de droits humains et de normes environnementales. L’initiative aura par conséquent un fort effet préventif, en incitant les entreprises à agir correctement et à prendre leurs responsabilités face à des entreprises qu’elles contrôlent.

Cornelio Sommaruga, président honoraire du CICR et membre du comité d’initiative, voit cette initiative comme une étape importante pour la Suisse: « En tant que siège des organisations humanitaires et terre d’accueil de nombreuses multinationales, la Suisse a une grande responsabilité et doit veiller à sa réputation. » D’autres Etats sièges de multinationales étudient d’ailleurs l’introduction de dispositions légales analogues.

En France, l’Assemblée nationale a ainsi adopté à fin mars une proposition de loi présentant de nombreux points communs avec cette initiative. Antoinette Hunziker-Ebneter, ancienne présidente de la Bourse suisse et actuelle directrice de Forma Futura Invest SA, souligne que « cette initiative permet de créer une base nouvelle réunissant les initiatives volontaires de la société civile et de l’économie privée et les efforts de régulation étatiques pour protéger les droits humains et l’environnement. Les entreprises obtiennent un outil contraignant pour minimiser les risques. Cela renforcera leur valeur et leur compétitivité. »

Les 66 organisations membres démarrent aujourd’hui la récolte de signatures. Nous comptons sur votre soutien pour que les entreprises suisses intègrent respect des droits humains et de l’environnement dans leurs relations d’affaires. Vous pouvez signer et recueillir des signatures.

Françoise Minarro est porte-parole Biodiversité & Toxiques pour Greenpeace Suisse.

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