Il semble qu’à Beznau1 la situation soit bien plus grave que ce qui avait été admis précédemment. Une information, parue dans la presse début octobre 2015, montre qu’il y a près d’un millier de trous sur les parois de la cuve de pression du plus vieux réacteur en activité sur la planète. Au regard de cet état de fait, il est totalement insensé de penser à remettre en marche ce réacteur. Beznau1 doit impérativement et définitivement être mis à l’arrêt. Tour d’horizon de la situation au travers de quelques questions essentielles.

La centrale de Beznau met en danger la population. Que signifie la présence de trous sur la cuve de pression pour la sécurité de cette centrale nucléaire?
La cuve de pression est le cœur du réacteur. C’est là que se trouvent les barres de combustible radioactif et que s’opère la réaction en chaîne. Si cette pièce lâche, il est pratiquement impossible d’éviter une fusion du cœur du réacteur, soit une catastrophe nucléaire. Un composant d’une telle importance ne peut pas être l’objet de faiblesses ou de défauts. La possibilité que les 46 années d’activité du réacteur ont fragilisé les parois de cette cuve aggrave particulièrement la situation. Il est toutefois difficile de se faire une idée précise du niveau de sureté de la centrale de Beznau, tant les informations disponibles sont lacunaires. Greenpeace exige donc une transparence complète de la part de l’exploitant, l’entreprise Axpo.

Est-il possible de réparer ou de changer la cuve de pression du réacteur?
Non, installer une nouvelle cuve est de facto impossible. Une réparation est également hors de question, car les trous, situés au cœur même de l’acier des parois, sont inaccessibles. Dans ces conditions, la seule mesure permettant de garantir la sécurité de l’installation est de l’arrêter définitivement.

Pourquoi est-il important de savoir si ces trous étaient déjà présents dans la paroi au début de l’exploitation, ou s’ils sont le résultat de l’activité de la centrale?
Axpo prétend que les défauts observés datent de la construction du réacteur, sans pour autant en apporter la preuve. En juillet, l’Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN) a pourtant analysé les documents datant de la construction, dans les années 1960, sans trouver la moindre trace d’irrégularités. Cela signifie qu’il est tout à fait possible que ces trous soient apparus ou se sont élargis pendant l’exploitation. Tant qu’il ne sera pas possible de réfuter cette hypothèse, Beznau doit impérativement rester à l’arrêt. Une remise en service pourrait entrainer une aggravation de la situation, voir un accident.

Axpo ne parle pas de trous mais d’irrégularités et de « clusters », et refuse d’admettre que ceux-ci mettent en péril la sécurité de la centrale. Que faut-il penser de ces affirmations?
Axpo minimise clairement la situation. Le fait que ces trous sont concentrés dans 7 « clusters » ne change rien au fait que la résistance de la cuve de pression du réacteur est affaiblie. Les cavités observées font un demi-centimètre en moyenne. Ce qui n’est de loin pas négligeable dans une paroi en acier de 17 centimètres d’épaisseur. Quelle que soit la nature exacte de ces défauts, il s’agit d’un affaiblissement de la cuve de pression qui pose un grave problème en matière de sécurité. On parle là de la pièce la plus importante pour la sécurité de l’installation: de telles faiblesses sont inacceptables. Beznau doit définitivement être mise à l’arrêt.

Florian Kasser est responsable des questions liées au nucléaire pour Greenpeace Suisse

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