Vers 6h30 ce matin, jour du 21e anniversaire de l’accident nucléaire de Tchernobyl, une vingtaine d’activistes de Greenpeace venus de toute l’Europe (Finlande, Royaume-Uni, Belgique, Pays Bas, Allemagne, France…) ont pénétré sur le site du chantier du futur réacteur nucléaire à Flamanville et ont interrompu les travaux.

Flamanville (France). Dix jours après que quatre citoyens anti-EPR ont passé un week-end suspendus dans un pylône de ligne THT, une douzaine d’activistes de Greenpeace se sont enchaînés sous deux camions postés en travers des accès au chantier. Une dizaine d’autres ont pénétré à l’intérieur du site et ont grimpé sur deux grues où ils ont suspendu des drapeaux de leurs pays et de l’Union européenne et une banderole «Stop EPR».

«Nous demandons aux deux candidats à la présidentielle de s’engager à stopper ce projet aberrant, déclare sur place Yannick Rousselet, de Greenpeace France. C’est l’avenir énergétique de la France qui sejoue. Profitons de l’entre-deux tours de la présidentielle pour en débattre et écouter les souhaits des Français.»

L’EPR est contesté. 78 % des Français estiment qu’il faut en priorité développer les énergies renouvelables pour qu’elles deviennent la source principale d’énergie, contre 19 % seulement défendent la poursuite du nucléaire . Le moratoire sur l’EPR est aussi l’une des quatre demandes adressées aux candidats à la présidentielle par Nicolas Hulot et l’Alliance pour la planète. Durant la campagne, José Bové, Dominique Voynet, Olivier Besancenot, mais aussi Philippe de Villiers, François Bayrou et Ségolène Royal se sont prononcés pour la suspension de ce projet. Quant à Nicolas Sarkozy, il se dit en faveur de la relance du nucléaire.

Greenpeace demande aux deux candidats en lice pour la présidentielle de clarifier leur position et réclame l’arrêt des travaux de construction à Flamanville, l’annulation du décret autorisant le projet et l’ouverture d’un vrai débat démocratique sur l’énergie.

L’EPR est inutile. Même en tenant compte de la fermeture des vieilles centrales, la France est en surcapacité énergétique (l’équivalent de la production de 10 réacteurs) et n’a pas besoin de nouveau réacteur dans les prochaines décennies. «Quant au réchauffement de la planète,les réponses se situent du côté de la politique des transports, du développement des énergies renouvelables et d’un programme de sobriété énergétique dans le bâtiment», affirme Frédéric Marillier. De plus, les réserves mondiales d’uranium sont limitées à 70 ans.

L’EPR est dangereux. 21 ans après Tchernobyl, EDF et les pouvoirs publics français s’entêtent à nier le risque nucléaire. Débutmars, Greenpeace a publié une étude analysant le danger lié à l’EPR : ce réacteur, le plus puissant au monde (1 600 MW), concentrera plus de radioactivité que ces prédécesseurs. Un accident sur l’EPR à Flamanville ferait des centaines de victimes dès les premiers jours, et plus de 30 000 morts à terme. L’utilisation d’un combustible à base de plutonium (le Mox) renforcera la radioactivité et la toxicité des rejets.

L’EPR est un non sens économique. L’EPR représente 2 000 emplois temporaires pendant sa construction, mais seulement 200 emplois stables à terme. Le développement d’une politique alternative créerait 450 000 emplois en 5 ans (Ademe). En Allemagne, le secteur des renouvelables a créé 130 000 emplois en dix ans; 250 000 autres sont prévus d’ici 2010.

L’EPR est déjà un échec. A ce jour, un seul autre EPR est en construction à Olkiluoto, en Finlande. Depuis le lancement des travaux mi-2005, le chantier tourne au désastre: 18 mois de retard, plus de 730 millions de dépassement budgétaire, 700 violations des règles de qualité et de sûreté… «Le chantier finlandais nous donne un avant-goût de ce qui nous attend en France, déclare Frédéric Marillier. Avec l’EPR, nous sommes à la croisée des chemins: d’un côté, on relance le nucléaire. De l’autre, on se dirige vers une politique énergétique plus sûre, plus propre, plus dynamique économiquement et fortement créatrice d’emplois.»

Mise à jour: Fin de l’occupation du chantier de l’EPR

Flamanville (France) 27|04|2007

Le juge du tribunal de Grande Instance de Cherbourg vient de rendre sa décision et condamne Greenpeace à 45 000 euros d’amendes par personnes et par infractions constatées. Cette amende est assortie d’une injonction jusqu’à la fin des travaux de l’EPR.

En clair, si Greenpeace décide de réitérer une action sur le chantier, pour chaque militant et pour chaque infraction constatée, l’association écologiste devra payer 45 000 euros. Greenpeace fait appel de cette décision de justice.

« Il est consternant de voir qu’en France les actions d’ouverture du débat public sur le nucléaire soit constamment sanctionnée alors que le processus qui a mené à la décision de la construction de l’EPR a été en permanence opaque et biaisé par le gouvernement » déclare Yannick Jadot, directeur des campagnes.

Comme annoncé précédemment, les militants de Greenpeace ont mis fin à l’occupation du chantier préalable à la construction de l’EPR avant même le rendu de la décision de justice.