Greenpeace et la Communauté de travail des oeuvres d’entraide ont invité le Conseil fédéral à prendre des décisions claires à caractère contraignant au Sommet mondial pour le développement durable de Johannesburg. Tout devrait être mis en oeuvre pour que « Johannesburg » ne soit pas un retour en arrière par rapport à « Rio ». Un plan d’actions concret comprenant des objectifs, des missions et des délais clairs et contraignants devrait être établi.

Zürich (ZH). Ce plan devrait notamment contenir un programme d’encouragement global pour les énergies renouvelables et des lois réglant la responsabilité civile internationale en matière d’environnement. Aujourd’hui, la libéralisation du commerce mondial représente un obstacle majeur à un changement de cap, d’où la nécessité de subordonner les règles du commerce aux accords sociaux et environnementaux.

Les deux organisations ont aussi reproché au Conseil fédéral de n’avoir pas intégré les engagements de Rio dans sa politique intérieure. Cette passivité est en contradiction avec la position progressiste que la Suisse adopte sur la scène internationale.

Le Sommet de la Terre de Rio, en 1992, avait créé de bonnes bases pour engager un changement de cap vers un développement durable, a déclaré Madeleine Bolliger, de la Communauté de travail Swissaid/Action de Carême/Pain pour le prochain/Helvetas/ Caritas, devant les médias. Mais ces décisions ont très peu été suivies d’effet et c’est plutôt une politique de libéralisation permanente et une globalisation de l’économie qui a été encouragées au cours de la décennie qui a suivie Rio. Cette politique a accentué la pauvreté et l’exploitation des ressources naturelles, et imposé au monde entier un modèle de développement, désigné à Rio comme incompatible avec le développement durable. Madeleine Bolliger a également critiqué l’ intention de s’appuyer sur des initiatives volontaires dans le cadre de partenariat plutôt que sur des contrats fermes engageant les gouvernements.

Heini Glauser, président de la fondation Greenpeace Suisse a renvoyé au problème de l’énergie, clé du développement durable. En contradiction flagrante avec les objectifs ambitieux, la décennie après Rio a connu un gaspillage des ressources d’une ampleur sans précédent. Entre 1992 et 2001, l’émission de CO2 a correspondu au quart de l’émission globale produite par l’utilisation de l’énergie au cours des 200 dernières années. Il ne s’agit plus de faire de beaux discours à Johannesburg, mais bien plus de s’engager en faveur d’accords concrets pour la mise en place des protocoles de Kyoto et d’un programme d’actions « Energies renouvelables ». Les deux milliards de personnes qui n’ont toujours pas accès à l’électricité devraient ainsi pouvoir couvrir leurs besoins élémentaires en énergie, comme par exemple la lumière électrique et les pompes à eau.

La représentante de Greenpeace, Alexandra Capeder, a demandé à la délégation suisse de se mobiliser pour que des lois en matière de responsabilité civile globale pour les dégâts causés à l’environnement soient élaborées. A Rio, les chefs de gouvernement se sont prononcés pour une application ferme du principe voulant que celui qui occasionne les dégâts paie; presque rien n’a été fait depuis. Mme Capeder a mentionné une étude réalisée par Greenpeace qui démontre que les multinationales s’en tirent trop souvent sans être punies, même lorsqu’elles ont causé des dommages extrêmement graves à l’environnement. Elle a cité comme exemple la catastrophe de Bhopal: la Dow Chemical, responsable de l’accident, a jusqu’à présent refusé de donner suite aux plaintes des victimes.

Il n’y a pas qu’à l’étranger, mais également en Suisse où l’application des décisions prises à Rio est insuffisante, a déclaré Rosmarie Bär de la Communauté de travail des oeuvres d’entraide. Elle a reproché au Conseil fédéral de n’avoir pas respecté les engagements pris à Rio : « la Suisse est loin d’un développement durable. » La différence est grande entre l’attitude engagée de la Suisse sur la scène internationale et sa politique intérieure. Alors qu’elle s’est attribué un rôle de leader sur le plan international cette année, proclamée l’année de la montagne par l’ONU, elle n’a toujours pas ratifié les protocoles de la Convention des Alpes. Mme Bär a invité le Conseil fédéral à mettre enfin le développement durable sur la liste de ses priorités et de nommer un/une délégué/e, indépendant/e de l’administration, responsable de ce dossier. En tant que représentante des oeuvres d’entraide, Rosmarie Bär est membre de la délégation officielle de la Suisse à Johannesburg.