Le spécialiste du droit des successions Christoph Burckhardt conseille toutes les personnes, des plus jeunes aux plus âgées, qui veulent coucher en temps voulu sur le papier leurs dernières volontés. Il soutient Greenpeace lors de l’ouverture de testaments et conseille les clients qui souhaitent faire un legs à des ­organisations d’utilité publique.

Un beau matin, l’avocat zurichois Christoph Burckhardt a trouvé dans la boîte postale des Zürcher Rechtsanwälte une lettre provenant de l’étude d’un notaire. Avant sa mort, un homme avait couché Greenpeace sur son testament. C’est ce que confirmait la lettre du notaire et la copie du certificat d’héritage en annexe. Toutefois, une «date de décès approximative» y était indiquée. «Cela m’a paru bizarre», explique Burckhardt, qui a alors pris son téléphone et composé le numéro du notaire. Cela a permis d’élucider le mystère de la date imprécise: pendant longtemps, personne n’avait signalé la disparition du défunt, car celui-ci vivait dans dif­férents pays, possédait plusieurs appartements et les voisins ne s’étaient pas inquiétés de ne plus le voir.

«Un phénomène typique de notre époque, poursuit Burckhardt, songeur, derrière le bureau bien rangé de son étude, près de la gare centrale de Zurich. Quand quelqu’un disparaît, ça ne choque plus personne.» Puis son visage s’éclaire, car, «heureusement», quand on a débarrassé le logement, on y a trouvé une notice. Le testateur y désignait Greenpeace comme seule héritière. Cette histoire, assez confuse deux ans plus tôt, s’achemine aujourd’hui vers une conclusion réjouissante. Et Greenpeace va pouvoir bénéficier d’une donation importante. Les appartements sont vendus, les transactions touchent à leur fin.

Prévoir judicieusement

La plupart des successions que Christoph Burckhardt gère pour des organisations d’utilité publique comme Greenpeace sont nettement moins compliquées. Mais toutes ont quelque chose de «spécial», à savoir qu’elles recèlent toujours des réflexions personnelles, des désirs, souvent de la passion et une volonté qu’il s’agit de respecter. Jour après jour, Christoph Burckhardt aide des clients à régler leur succession. «Quand j’arrive à fournir une analyse objective, bien justifiée sur le plan légal, qui débouche sur une solution simple et rapide, c’est pour moi une grande satisfaction.»

Sa clientèle couvre tous les âges. Les plus jeunes ont 20 ans, d’autres ont déjà un âge vénérable. «Se préoccuper de sa propre mort n’est réjouissant à aucun moment de la vie, commente Burckhardt. Toutefois, ceux qui viennent chez moi ont décidé d’y réfléchir et de demander conseil, et je fais tout pour arriver à une solution cohérente.» Certains vivent seuls, ont peut-être perdu leur conjoint ou partenaire, un parent ou un enfant; d’autres ont connu des querelles d’héritage entre frères et sœurs, et souhaitent préserver leurs propres enfants de telles expériences; il y a aussi ceux qui sont sur le point de fonder une famille recomposée et qui souhaitent se renseigner pour régler leur succession de manière équitable. Tous ont en commun le fait de réfléchir de leur vivant à ce qu’il doit advenir de leur fortune. «Une décision judicieuse, déclare Burckhardt. C’est toujours bien de mettre de l’ordre dans ses affaires.»

De nombreuses questions

Certaines personnes ont déjà des idées concrètes, mais la plupart ont surtout de nombreuses questions. «Les connaissances en matière de succession sont faibles, constate l’avocat. Beaucoup ont déjà entendu dire qu’il existait quelque chose comme une part réservataire*, mais très peu savent ce que cela signifie.» Burckhardt leur explique quel est le pour­centage de libéralités prescrit pour tel ou tel membre de la famille. Seul celui qui n’a pas d’héritier légal peut disposer de l’intégralité de sa fortune. Or c’est justement chez ces clients que des biens immobiliers sont en jeu. Pour Greenpeace, il s’agit souvent d’un exercice délicat, car des successions liées à des prescriptions peuvent être particulièrement fastidieuses. Comme l’organisation tient, en outre, à revendre ces biens en fonction de critères sociaux, et à garantir qu’ils seront utilisés de manière éco­logique, elle a conclu un partenariat avec l’association HabitatDurable Suisse.

Des héritiers toujours plus âgés

Les conseils visant à favoriser des organi­sations à but non lucratif intéressent particulièrement Christoph Burckhardt, car cette part de son travail prend toujours plus d’importance. Il y a plus d’un siècle, lorsque le Code civil suisse est entré en vigueur, l’espérance de vie moyenne ne dépassait pas 40 ou 50 ans, rappelle-t-il. Avec l’augmentation très nette de la longévité, le contenu initial et la mission du droit des successions ont perdu de leur actualité: «Aujourd’hui, les descendants sont déjà près de la retraite quand ils héritent de leurs parents.» Souvent, l’héritage ne les intéresse plus, et encore moins les éventuels devoirs qui leur incombent. «Pour bien des personnes âgées, hériter est stressant», constate Christoph Burckhardt: il faut vider un logement, se rendre dans des offices publics, consulter des dossiers.

Rien n’est gravé dans la pierre

Christoph Burckhardt dégage une impression de calme et de compétence qui fait fondre toutes les inquiétudes. C’est d’ailleurs l’une de ses principales préoccupations: apaiser les craintes qui empêchent les gens de faire connaître leurs dernières volontés, voire encourager ses clients à s’intéresser à ce thème. «Il peut toujours arriver quelque chose. Nous courons plus de risques. Nous circulons en voiture ou à vélo, traversons des rues la plupart du temps les yeux rivés sur nos portables. La vie est devenue plus dangereuse.» Il recommande des solutions aussi simples que possible. Un testament peut être adapté et modifié à tout moment, rien n’est définitivement gravé dans la pierre. Son credo: «Mettre tout en ordre, rédiger son testament, et ne plus y penser. Mais attention à bien le ranger!»


*Part réservataire et quotité disponible

Quand on rédige un testament, on peut déterminer la «quotité disponible»: il s’agit de la part de la fortune qui n’appartient pas à la réserve héréditaire et qui peut donc être attribuée librement. Pour le conjoint, le partenaire enregistré ou les descendants et, le cas échéant, les parents, la loi prescrit une part minimale d’héritage. Quiconque ne laisse aucun héritier légal peut disposer de toute sa fortune.

Pour toute question ou pour passer commande du guide testamentaire gratuit:
[email protected]
www.greenpeace.ch/legs

 


Christoph Burckhardt,
né en 1956, a rédigé sa thèse de doctorat sur le thème des successions. Après l’obtention du brevet d’avocat du canton de Zurich en 1988, il travaille dans une étude zurichoise. De 1990 à 2013, il est partenaire du cabinet Peyer Partner, puis des Zürcher Rechtsanwälte. Spécialisé dans le droit des successions, il accompagne des organisations à but non lucratif comme Greenpeace Suisse pour le traitement de legs et de testaments.

 

 

Ursula Eichenberger a travaillé comme journaliste pour divers médias (dont la Neue Zürcher Zeitung, la Weltwoche et la Sonntags­Zeitung) et, longtemps, comme rédactrice auprès du Tages-Anzeiger. Spé­cialisée dans les thèmes sociaux et sociétaux, elle travaille aujourd’hui comme auteure indépendante et rédactrice, spécialiste de la collecte de fonds et conseillère pour des fondations et des organisations de la société civile (notamment Unicef Suisse).