Les lessives libèrent dans les eaux suisses des substances chimiques toxiques et œstrogéniques. Selon une nouvelle étude de Greenpeace, jusqu’à 94% des éthoxylates de nonylphénol (NPE) présents sur des textiles importés sont éliminés lors du premier lavage en machine. Les NPE rejettent dans les eaux usées du nonylphénol (NP), une substance nocive pour l’environnement.


En 2011, Greenpeace lance sa campagne internationale « Detox! » ©Greenpeace/Snellman (Archives)

Dans son dernier rapport « Dirty Laundry: Reloaded » (en anglais), Greenpeace a analysé des produits textiles de différentes marques achetés dans onze pays. Deux vêtements provenant de magasins suisses ont été testés positifs: un maillot pour enfant de l’équipe nationale suisse de football de la marque Puma et un pyjama de la marque Calvin Klein. Ces résultats montrent que l’industrie textile est responsable d’une circulation des polluants à l’échelle mondiale: l’utilisation massive de substances chimiques lors de la production laisse sur les vêtements des résidus qui contaminent ensuite l’eau de lavage. Les effets directs de la pollution de la branche textile ne se limitent ainsi pas aux seuls pays de production. « Les marques à la mode transforment leurs clients en complices involontaires de la pollution de l’eau à l’échelle mondiale », affirme Matthias Gunsch, de la campagne Toxiques de Greenpeace Suisse. « La branche doit enfin désintoxiquer sa production. »

Dans la moitié des échantillons examinés, plus de 80% des NPE ont été éliminés lors de la première lessive. On peut donc supposer que les résidus de NPE partiront tous au lavage durant la durée de vie des vêtements, la plus grande partie lors des deux premières lessives. Les NPE arrivent avec l’eau de lavage dans les canalisations et ainsi dans les stations d’épuration. Ces dernières ne peuvent pas filtrer efficacement les NPE et empêcher le rejet de ces produits chimiques dans l’environnement. Les NPE libèrent dans les eaux usées du nonylphénol (NP), une substance polluante pour l’environnement et perturbatrice du système endocrinien. Seul un traitement additionnel des eaux usées au charbon actif permettrait d’empêcher le rejet de NPE et de NP avec l’eau traitée.


Les marques à la mode transforment leurs clients en complices involontaires de la pollution.

L’utilisation des NPE n’est pas réglementée dans les pays de production des textiles testés: Chine, Vietnam, Philippines, Thaïlande, Sri Lanka et Turquie. L’utilisation et le rejet des NPE sont en revanche interdits ou strictement encadrés dans les pays importateurs de l’Union européenne. Dans deux rapports précédents, Greenpeace avait révélé comment l’industrie textile internationale contamine les réserves d’eau potable de millions de personnes en Chine. Greenpeace avait ensuite recherché des traces de NPE sur une large sélection de textiles produits en Asie (78 articles).

Les marques Nike, Adidas, Puma, Li Ning, H&M et C&A se sont déjà engagées à éliminer les substances chimiques dangereuses de leurs productions avant 2020. Greenpeace milite avec sa campagne « Detox! » pour une production textile sans produits chimiques toxiques. L’organisation de défense de l’environnement demande à toutes les grandes marques de vêtement de mettre fin à l’utilisation des NPE dans leurs processus de production dès 2013. Des alternatives non nocives existent depuis longtemps sur le marché.