Les 14 et 15 septembre derniers, se tenait la conférence environnementale voulue par le gouvernement français. L’occasion pour François Hollande de préciser les contours de sa politique. Greenpeace dresse un bilan peu flatteur de ces deux journées. Si d’un coté l’intention d’ouvrir la discussion aux organisations de défense de l’environnement est intéressante, aucune décision majeure n’est venue indiquer que le gouvernement français souhaite changer de cap. L’approvisionnement énergétique de la France restera essentiellement basé sur le nucléaire et les énergies fossiles. Pas de transition énergétique à l’horizon donc.


Les signaux envoyés par le gouvernement français n’inspirent guère confiance. ©Greenpeace/Armestre (Archives)

« Nous ne sommes pas ‘rassurés’, nous resterons vigilants sur la mise en adéquation des moyens et financements avec les objectifs sur le logement, sur les renouvelables, l’efficacité, les transports, etc. La vraie transition sera engagée quand on parlera de sortie du nucléaire et de la fin de notre dépendance aux fossiles. Nous sommes habitués aux discours pleins d’emphase sur l’environnement. En leur temps, Nicolas Sarkozy ou Jean-Louis Borloo avaient aussi fait des annonces spectaculaires comme la taxe carbone ou les objectifs ambitieux concernant le logement… » commente Jean-François Julliard, Directeur Général de Greenpeace France dans le communiqué de presse du 15 septembre.

Deux exemples démontrent bien le manque de vision dont fait preuve le nouveau pouvoir en place: La décision de fermer la centrale de Fessenheim et le rejet de 7 permis d’exploration d’hydrocarbures de schiste. Si sur le papier ces annonces semblent être de bonnes nouvelles il faut bien voir qu’elles ne sont pas le résultat d’une nouvelle orientation énergétique pour le pays. Au contraire, elles sont symptomatiques de l’immobilisme  et de l’incohérence de la France dans le domaine.

L’annonce de la fermeture de la centrale de Fessenheim, la plus ancienne de France, pour 2016 « n’est qu’une confirmation. Annoncée depuis des mois ‘avant 2017’ cette fermeture pourrait être effectuée beaucoup plus rapidement. Les travaux ne doivent pas être faits et financés, si cette centrale n’est pas sûre, il faut la fermer! » explique Jean-François Julliard. Fessenheim a été le théâtre de deux incidents majeurs en 2012. L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) exige la réalisation de travaux avant juillet 2013, sans quoi le site sera définitivement fermé. Selon le sénateur du Haut-Rhin Jean-Marie Bockel, ces travaux pourraient coûter près de 200 millions d’euros.

Une fermeture en 2016 impose donc une dépense non négligeable qui serait probablement bien mieux investie ailleurs. Dépenser plusieurs dizaines de millions d’euros pour maintenir l’activité durant 3 ans seulement est non seulement absurde, mais aussi dangereux. Rappelons que la ville de Bâle est située à moins de 50 kilomètres de Fessenheim. « Une promesse de campagne et une équation qui n’a pas de sens. C’est mathématique: si on ferme Fessenheim et qu’on lance l’EPR de Flamanville comme promis en 2016, on ne peut pas réduire la part du nucléaire! Il faudra décider la fermeture d’autres centrales dans le quinquennat » poursuit Jean-François Julliard.

Sur la question des gaz de schiste le discours de François Hollande s’est montré d’une subtilité particulièrement pernicieuse. Le président français s’oppose à la fracturation hydraulique et rejette donc les demandes d’exploration de 7 compagnies pétrolières. Malheureusement il ne s’oppose pas aux gaz de schiste. Cette conférence aurait pourtant été une bonne occasion pour lancer un signal fort afin de sortir la France de cette fuite en avant catastrophique que représente la recherche d’hydrocarbures non conventionnelles. Malheureusement  « le Président s’est borné à appliquer de manière rigoureuse la loi votée en 2011 par l’UMP et le PS, qui rejette la fracturation hydraulique. (…) Il n’a pas fermé la porte aux hydrocarbures de schiste, il ne l’a juste pas rouverte! Greenpeace regrette que le Président se borne à la question de cette technique. La vraie transition ne passe pas par la recherche de nouvelles sources fossiles » commente Jean-François Julliard.

Dans une tribune parue sur lemonde.fr le 18 septembre dernier,  Jean-François Julliard commente une dernière fois cette conférence environnementale et l’action du gouvernement français:
 « En France, la conférence environnementale voulue par François Hollande était le premier acte d’une véritable stratégie du changement: la fameuse transition écologique et énergétique. Mais il est urgent d’agir. Le risque d’atteindre un point de rupture (perturbation irréversible du climat, choc brutal sur les prix de l’énergie, catastrophe technologique majeure) augmente et le temps disponible pour agir est compté. Nous avons perdu beaucoup de temps durant le quinquennat précédent.

Le Grenelle de l’environnement qui avait suscité une ferveur et un enthousiasme nouveaux a accouché d’une souris. Les mesures finalement entrées en vigueur sont insuffisantes. François Hollande et son gouvernement sauront-ils changer de logiciel et prendre les mesures ambitieuses dont notre planète et notre pays ont besoin en matière de protection de l’environnement et de changement de modèle énergétique? (…) Les signaux envoyés par le gouvernement n’inspirent guère confiance: la poursuite des forages profonds au large de la Guyane, le départ de Nicole Bricq du ministère de l’Écologie, les ambiguïtés sur les gaz et pétrole de schiste, les provocations d’Arnaud Montebourg à quelques jours d’une conférence environnementale, etc. Le gouvernement nous a demandé de le juger sur les actes. Pour l’instant, les actes sont inquiétants et ne vont pas dans la bonne direction. »