Que nous coûte l’utilisation des pesticides? Afin de répondre à cette question, Greenpeace, Pro Natura, ASPO/BirdLife Suisse et le WWF ont mandaté un institut pour calculer les effets secondaires financiers du recours aux pesticides en Suisse. Le résultat montre que ces poisons coûtent chaque année 50 à 100 millions de francs aux Suisses. Une taxe prélevée sur ces substances doit donc à l’avenir faire passer à la caisse les auteurs des dommages causés à l’environnement. Les organisations de défense de la nature exigent par ailleurs un plan en vue de réduire l’utilisation des pesticides en Suisse.


Il faut prélever une taxe sur les pesticides en Suisse. ©Greenpeace/Edwards (Archives)

A la demande des organisations de défense de l’environnement Greenpeace, Pro Natura, ASPO/BirdLife Suisse et WWF, l’Institut de recherche et de conseil Infras a calculé les coûts externes de l’utilisation des pesticides en Suisse dans le cadre d’une étude pilote. Les coûts de la santé, des dommages à l’environnement et de l’effort de régulation ont été pris en compte. Résultat: les charges annuelles portées par la collectivité sont de l’ordre de 50 à 100 millions de francs, suivant les trois principes de calcul appliqués.

Les facteurs tels que la perte de diversité des espèces sur les terres cultivées ne pouvant dans un premier temps pas être chiffrés en raison de l’absence de données complètes, la localisation des coûts réalisée dans cette étude fait preuve d’une grande prudence. En réalité, l’utilisation des pesticides en Suisse devrait donc coûter bien plus cher. Chaque année, le secteur agricole dépense en tout 124 millions de francs pour des pesticides, ce qui signifie que chaque franc dépensé à cet effet coûte 80 centimes en plus à la population suisse.

Ces cinq dernières années, les ventes de pesticides en Suisse ont représenté en moyenne 2’180 tonnes par année. Une fois dans les champs, ces produits chimiques toxiques se retrouvent dans nos assiettes par l’intermédiaire des aliments et polluent l’environnement. Une étude récemment publiée par l’Institut de Recherche de l’Eau du Domaine des EPF (EAWAG) a démontré la présence de cocktails toxiques contenant jusqu’à 40 pesticides différents dans les ruisseaux et rivières du Plateau. L’étude de l’Infras montre que les effets secondaires des pesticides ne touchent pas seulement l’agriculture, mais toute la population suisse, aussi financièrement.

Lorsque des pesticides sont utilisés en Suisse, les coûts liés à l’environnement et à la santé sont supportés par la collectivité. « D’un point de vue économique, il s’agit d’une défaillance classique du marché », affirme Daniela Hoffmann, experte du WWF. « Tandis que les pollueurs exploitent et endommagent gratuitement les ressources environnementales, les coûts à long terme sont à la charge de la population suisse ».

Pour résoudre cette défaillance, la Confédération doit assurer la véracité des coûts et une réduction de l’emploi des pesticides. Les organisations de défense de l’environnement demandent donc qu’une taxe soit prélevée sur les pesticides en Suisse. « Au Danemark et en Norvège, de telles taxes incitatives sont perçues depuis des années sur les pesticides, avec succès. La hausse des prix qui en résulte a pour effet de réduire leur utilisation », indique Daniela Hoffmann.


Moins de pesticides en Suisse: le plan des organisations de défense de l’environnement
En novembre 2013 déjà, Greenpeace, Pro Natura, ASPO/BirdLife Suisse et le WWF présentaient un mode d’emploi pour la réduction des pesticides au Conseil fédéral:

  • Plan de réduction national des pesticides avec objectifs de réduction mesurables et ambitieux
  • Interdiction des pesticides particulièrement dangereux pour l’environnement et la santé
  • Publication et évaluation des pesticides autorisés par la Confédération
  • Publication de la charge en pesticides à laquelle sont soumis la population et l’environnement
  • Recherche et soutien de méthodes phytosanitaires alternatives
  • Information et conseils complets et indépendants aux agriculteurs sur la protection des cultures
  • Création d’incitations en faveur des systèmes et des techniques de réduction des pesticides
  • Interdiction des pesticides conventionnels pour l’utilisation privée
  • Participation de diverses unités administratives et organes de la société civile au plan de réduction des pesticides.