Alors que les membres du Conseil de sécurité sont invités à s’exprimer sur une résolution ouvrant la voie à une guerre contre l’Irak, Greenpeace appelle les membres des Nations-unies à convoquer l’Assemblée générale pour régler pacifiquement la crise irakienne. Face au bellicisme « jusqu’au boutiste » de G. Bush et T. Blair qui conduit le Conseil de sécurité dans une impasse, il existe encore un espoir pour éviter la guerre qui repose sur le recours au mécanisme peu connu d’« Unité pour la Paix ». Il consiste à appeler l’ensemble des pays membres des Nations-unies à se réunir pour une ultime tentative de règlement pacifique de la crise.

Paris (France). C’est en novembre 1950, pendant la guerre de Corée, que l’ONU adoptait, sur l’initiative des Etats Unis, la Résolution 377 intitulée « Unité pour la Paix ». Cette résolution stipule que si, en l’absence d’unanimité de ses membres permanents, le Conseil de sécurité n’est pas capable de maintenir la paix internationale alors qu’il existe une « menace contre la paix, une rupture de la paix ou une acte d’agression », l’Assemblée générale « examinera immédiatement la situation ». L’Assemblée générale peut se réunir dans les 24 heures pour examiner cette question, et recommander des mesures collectives aux membres des Nations-unies pour « maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales ». Cette procédure peut être activée soit par sept membres du Conseil de sécurité soit par une majorité des membres de l’Assemblée générale.

Cette procédure d’Unité pour la Paix a été utilisée dix fois depuis 1950 pour tenter de stopper des conflits alors que le Conseil de sécurité ne parvenait pas à trouver un accord. Ainsi, après la nationalisation du canal de Suez par l’Egypte en 1956, la Grande-Bretagne et la France avaient attaqué et occupé une partie du canal. Les résolutions de cessez-le-feu du Conseil de sécurité avaient été bloquées par le veto de la Grande-Bretagne et de la France. Les Etats-Unis s’étaient alors rendus à l’Assemblée générale pour demander un cessez-le-feu et un retrait des troupes. Une session extraordinaire d’urgence avait été convoquée dans le cadre de la résolution d’Union pour la paix. Face à la forte opposition de l’Assemblée générale, il avait fallu moins d’une semaine à la Grande-Bretagne et à la France pour se retirer.

L’absence d’unanimité au sein du Conseil de sécurité est aujourd’hui avérée et les conditions pour invoquer la résolution 377 sont réunies. C’est la première fois dans l’histoire que les Nations-unies doivent se prononcer sur l’autorisation ou non d’une guerre préventive et de nombreux pays-membres pensent qu’une telle guerre constitue en elle-même une menace très sérieuse pour la paix et la sécurité internationale.

« Partout dans le monde, nous avons été des millions à manifester contre la guerre. La majorité des membres du Conseil de sécurité s’opposent à la logique de guerre. La France, la Russie et la Chine menacent d’opposer leur veto à une résolution validant de fait une guerre préventive contre l’Irak… Pourtant la marche vers la guerre, voulue par Bush et Blair, se poursuit. La résolution « Unité pour la paix » constitue notre dernier espoir d’éviter cette sale guerre », déclare Yannick Jadot, directeur des campagnes de Greenpeace France.

Greenpeace ne veut pas, ici, anticiper les décisions que pourrait prendre l’Assemblée générale : refus d’une intervention militaire sans autorisation explicite du Conseil de sécurité ; renforcement des inspections? Mais le vote de la majorité des pays du monde, en particulier s’il est quasi-unanime, rendrait beaucoup plus difficile la décision unilatérale d’entrer en guerre.

« La France doit poursuivre son effort pour la paix mondiale et prolonger la logique du désarmement de l’Irak dans la paix, quitte à opposer son veto à une nouvelle résolution du Conseil de sécurité qui validerait, de fait, les velléités guerrières de l’administration Bush. Ce veto français, associé à une convocation de l’Assemblée générale dans le cadre de la résolution Union pour la Paix permettrait à l’Organisation des Nations unies de sortir par le haut d’une crise dont le prolongement n’aurait d’autre issue que la guerre. Cette démarche ambitieuse soulignerait, à n’en point douter, l’isolement non de la France mais des Etats-Unis. Il n’y a pas de temps à perdre », conclut Yannick Jadot.