Zurich, mercredi 25 avril 2018

Ce matin, des militants Greenpeace ont dressé un tipi sur la Paradeplatz à Zurich. Des Aînées pour la protection du climat et une délégation de femmes autochtones dirigeantes du Canada et des USA y protestent ensemble contre les engagements nuisibles au climat pris par Credit Suisse et UBS. Un rapport de Greenpeace Suisse en montre que de 2015 à 2017, Credit Suisse et UBS ont mis USD 12.3 milliards à disposition d’entreprises exploitant des combustibles fossiles particulièrement sales au point d’être qualifiés d’extrêmes. Rapporté à la population suisse en 2016, l’engagement des grandes banques contre le climat ces trois dernières années correspond à environ USD 1470 par personne. C’est plus que dans tout autre pays européen.

Une délégation de femmes autochtones séjourne en Suisse cette semaine à l’invitation du Women’s Earth and Climate Action Network. Elles représentent les Premières Nations des Tsleil Waututh, Lakota, Dine/Navajo, Standing Rock Sioux Tribe et la United Houma Nation de Louisiane. Elles luttent toutes contre les oléoducs d’entreprises qui menacent leurs terres et leur accès à l’eau potable et contreviennent aux droits des populations autochtones. Elles dénoncent en particulier les projets d’Energy Transfer Partners (Dakota Access Pipeline et Bayou Bridge Pipeline), de Kinder Morgan (Trans Mountain Pipeline) et d’Enbridge (Pipeline Line 3).

Ces entreprises sont cofinancées par Credit Suisse et UBS. La revendication de la délégation est claire : les deux grandes banques doivent immédiatement mettre fin à ces financements. « Des peuples autochtones sont en danger. Nous avons besoin du soutien de la Suisse. Les banques doivent être amenées à rendre des comptes sur leurs affaires avec ces entreprises des plus sales. Et les banques doivent reconnaitre officiellement ne plus financer de telles entreprises », exige Michelle Cook, avocate autochtone des droits de la personne et chargée de mission de la commission des droits de la personne du peuple Dine/Navajo. De nombreuses banques internationales – dont BNP Paribas et HSBC – ont déjà officiellement annoncé vouloir cesser de financer les projets d’oléoducs pour sables bitumineux controversés et les entreprises qui en sont responsables.

Dans leur lutte pour plus de justice et la protection du climat, les femmes autochtones ont reçu ce mercredi le soutien des Aînées pour la protection du climat qui ont lancé une action en justice pour forcer le Conseil fédéral à mieux s’engager contre le réchauffement climatique. Les Aînées pour la protection du climat ont reçu la délégation transatlantique dans un tipi monté par des militants sur la Paradeplatz à Zurich. « L’action en justice des Aînées pour la protection du climat se dirige contre le Conseil fédéral. Mais Credit Suisse et UBS doivent également assumer leurs responsabilités dans la politique climatique, » c’est ainsi qu’Elisabetta Dredge explique le soutien que les Aînées pour la protection du climat accordent aux femmes indigènes.

Les banques suisses travaillent contre l’Accord de Paris sur le climat

L’action de protestation des femmes autochtones et des Aînées pour la protection du climat a lieu le jour de la publication du rapport [1] dans lequel Greenpeace Suisse et BankTrack expliquent que de 2015 à 2017, Credit Suisse et UBS ont mis USD 12.3 milliards à disposition d’entreprises exploitant des combustibles fossiles extrêmes. En font partie les sables bitumineux, le pétrole extrait dans l’Arctique et les forages en eaux profondes, l’extraction de charbon, les centrales électriques au charbon et l’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL) en Amérique du Nord. Cette sélection se base sur rapport du think tank britannique Carbon Tracker Initiative[2].

Rapporté à la population suisse en 2016, l’engagement des grandes banques contre le climat ces trois dernières années correspond à environ USD 1470 par personne. En comparaison européenne, la Suisse se trouve ainsi en tête de classement – suivie par le Royaume-Uni dont les banques ont investi durant la même période près de USD 450 par personne. La Suisse n’est dépassée que par le Canada et ses USD 1960 par personne.

Et la place financière suisse continue de miser sur des entreprises actives dans les énergies fossiles les plus sales. Credit Suisse a ainsi récemment collaboré avec d’autres grandes banques pour trouver des capitaux à long terme jusqu’en 2078 pour l’entreprise canadienne Enbridge.

« Credit Suisse et UBS travaillent contre l’Accord de Paris sur le climat que la Suisse a ratifié. Elles jouent avec notre climat. Notre environnement et la population paient cher l’aveuglement et l’avidité de ces deux banques. Tant que les combustibles fossiles extrêmes continueront d’être financés, ils feront grossir la bulle de CO2 et les risques climatiques financiers, » dénonce Katya Nikitenko, spécialiste en finances chez Greenpeace Suisse.

Greenpeace Suisse appelle les grandes banques suisses à présenter d’ici le Sommet de l’ONU sur le climat qui se tiendra à Katowice en décembre de cette année des projets avec des échéances claires pour mettre tous les flux financiers en accord avec l’Accord de Paris sur le climat. Il s’agit d’arrêter immédiatement de financer les entreprises qui extraient du charbon ou exploitent des centrales au charbon, qui contreviennent aux droits internationalement reconnus aux populations autochtones et rendent les sables bitumineux exploitables.


Plus d’informations :

Les photos de l’action de protestation des femmes autochtones et des Aînées pour la protection du climat sur la Paradeplatz à Zurich se trouvent ici ce mercredi dès 13h30. Des vidéos seront disponibles sur demande au cours de l’après-midi.

« Les banques suisses à la fin de l’ère des énergies fossiles », Rapport de Greenpeace Suisse et BankTrack

Vous trouverez d’autres informations sur la « Indigenous Women’s Delegation To Europe Continues Push For Fossil Fuel Divestment By Major Banks » dans le communiqué de presse du Women’s Earth and Climate Action Network (WECAN)

Evénement public : Ce jeudi 26 avril 2018, ces femmes autochtones parleront de leurs expériences dans la luttes contre les géants des énergies fossiles.


Contacts :
Katya Nikitenko, auteure de « Les banques suisses à la fin de l’ère des énergies fossiles » et spécialiste finances chez Greenpeace Suisse, +41 79 937 63 83, [email protected] (en anglais)

Osprey Orielle Lake, fondatrice et directrice du Women’s Earth and Climate Action Network (WECAN) International, +14 15 722 21 04, (en anglais)


[1] Les résultats et les analyses du rapport « Les banques suisses à la fin de l’ère des énergies fossiles » se basent sur les sources suivantes :
Banking on Climate Change: Fossil Fuel Finance Report Card 2018, Rainforest Action Network, BankTrack, the Indigenous Environmental Network, Oil Change International et The Sierra Club et soutenu par Greenpeace, qui révèle le classement du financement total (prêts et souscriptions) de 36 banques internationales aux 30 principales entreprises actives dans les six sous-secteurs des combustibles fossiles extrêmes (plus six entreprises d’oléoducs pour sables bitumineux) pour la période 2015-17. Ces banques sont inclues dans l’analyse au regard du volume de leurs activités commerciale et d’investissement et de l’ampleur de leurs liens avec les entreprises actives dans le domaine des combustibles fossiles extrêmes. Ces dernières ont été sélectionnées en prenant en compte leurs réserves, leur capacité de production ou de leur production annuelle dans chacun des combustibles fossiles extrême pris en compte par notre analyse. Le secteur du charbon est pris dans son ensemble au regard de son impact dévastateur pour le climat mais aussi pour l’environnement, la santé et les droits humains.

Banks vs. The Paris Agreement: Who’s still financing coal plant development? Un rapport et des recherches effectués par Urgewald, Friends of the Earth France et Re:Common and Rainforest Action Network sur le financement par des banques de plus 120 développeurs de centrales au charbon identifiés par Urgewald. Ces 120 compagnies sont derrière les 2/3 de l’augmentation de la production d’énergie par le charbon.

Les recherches menées par Greenpeace sur le financement par Credit Suisse et UBS d’entreprises d’oléoducs controversées à partir de sources provenant de Bloomberg Finance L.P.

[2] La dénomination “combustibles fossiles extrêmes” se réfère aux hydrocarbures non-conventionnels (sables bitumineux, pétrole de l’Arctique, forages en eaux profondes, hydrocarbures de schiste) et le gaz naturel liquéfié (GNL), ainsi que tout le secteur du charbon. Cette sélection s’appuie sur le travail fait par la Carbon Tracker Initiative afin d’identifier les projets gaziers et pétroliers pour lesquels les risques financiers sont les plus élevés au regard des scénarios de stabilisation du climat à un réchauffement de 2°C maximum. Le secteur du charbon est pris dans son ensemble au regard de son impact dévastateur pour le climat mais aussi pour l’environnement, la santé et les droits humains.