Greenpeace publie aujourd’hui une étude évaluant les effets d’un accident ou d’un attentat contre les camions de plutonium passant près de Paris et Lyon. Selon la gravité des accidents, les retombées de plutonium pourraient contaminer jusqu’à des centaines de kilomètres carrés et des millions de personnes.

Paris (France). Cette étude, effectuée par les
consultants nucléaires indépendants Large & Associates (1) se
penche sur un certain nombre de scénarios d’accidents et d’actes de
terrorisme. Sur la base d’hypothèses officielles et conservatrices
(2), elle modélise la dispersion et les retombées de particules
respirables de plutonium à la suite d’un incendie grave et prolongé
en divers endroits, notamment à proximité du château de Versailles,
près de Paris, et dans la banlieue de Lyon (3).

« Même si nous sommes restés très prudents dans nos
modélisations, nous sommes partis de l’hypothèse que le(s)
véhicule(s) du convoi se trouveraient entourés par un feu d’une
intensité suffisante pour venir à bout des châteaux FS47 contenant
le dioxyde de plutonium, et qu’un ou plusieurs de ceux-ci
cèderaient pour rejeter et propulser dans l’air un panache de
contamination radioactive, bien au-delà du périmètre immédiat de
l’accident, et jusque sur Paris. Les conséquences sanitaires d’un
accident grave dans le tunnel de Versailles doivent être
considérées comme inacceptables »déclare le consultant nucléaire
John Large, auteur de l’étude. Les effets d’un accident grave ou
d’un attentat seraient catastrophiques et nécessiteraient un
périmètre de sécurité pouvant s’étendre jusqu’à 110 km du site,
selon la gravité de l’accident. A titre indicatif, la tour Eiffel
ne se trouve qu’à 15 km du point de passage hebdomadaire du convoi.
Des millions de personnes seraient touchées par les retombées du
panache de plutonium, induisant plusieurs milliers de morts par
cancers à long terme.

Ces conclusions sont d’autant plus préoccupantes que selon le
rapport de la commission Vrousos (4) rendu public hier: « La France
n’est toujours pas dotée d’une véritable stratégie de gestion du
risque pour faire face à une contamination importante du territoire
qui résulterait d’un accident nucléaire ou d’un acte de
malveillance entraînant une exposition durable de la population ».
« Ces études révèlent clairement que les transports de plutonium
constituent un risque inacceptable et doivent cesser
immédiatement »déclare Yannick Rousselet, chargé de Campagne
nucléaire à Greenpeace France. « Cela montre l’étendue de
l’irresponsabilité de l’industrie française du plutonium quand elle
s’entête à effectuer ces transports alors qu’ils représentent une
cible potentielle de choix pour des terroristes ».

Greenpeace interpelle depuis plus d’un an les autorités
publiques sur l’étude qu’elles font des risques encourus aux
populations et les dispositifs d’intervention prévus en cas
d’accident ou d’attentat. Jusqu’à présent, aucune réponse n’a été
donnée. La seule réponse effective des autorités est l’arrêté
« secret défense » qui veut museler toute information relative aux
transports nucléaires en France. Le fait que les transports soient
fréquents (deux camions par période de 7 à 10 jours), prévisibles
(le même trajet toutes les semaines), et mal protégés (camions
banalisés) comparés (par exemple) aux transports de plutonium
militaire étasuniens, les rend particulièrement vulnérables à des
attentats.

(1) Ingénieur consultant, Membre de l’Institut des
Ingénieurs en Génie Mécanique (UK), Membre diplômé de l’Institut
des Ingénieurs en Génie Civil (UK), Membre de la Société
britannique du Génie Nucléaire, et Membre de la Société Royale
d’Art (UK); John Large a collaboré avec de nombreux gouvernements;
il a notamment dirigé l’équipe d’experts pour l’évaluation des
risques et des dangers des opérations en 2001 liées au sous-marin
nucléaire le Koursk. Il fut décoré à cette occasion par les
autorités russes pour le sauvetage du Koursk.

(2) La quantité rejetée envisagée par Large &
Associates s’appuie sur des chiffres du département étasunien de
l’Energie (US DoE) publiés dans une récente analyse d’impact
environnemental. Le schéma des retombées a été calculé à l’aide du
modèle NOOA Hypsplit et de simulations d’élévation de panache
faites par Hotspot. Les effets sanitaires ont été calculés à l’aide
du programme COSYMA de modélisation de la dispersion radioactive et
des conséquences sanitaires mis au point par la Commission
européenne.

(3) Les investigations de Greenpeace au cours des dernières
années ont relevé que des convois transportant environ 300
kilogrammes de plutonium passent par ces endroits toutes les
semaines lors de leur trajet de 1 000 km entre la Normandie et la
Provence.

(4) La commission Vrousos avait été chargée par
André-Claude Lacoste, Directeur de la DGSNR, au nom du Ministre de
la santé, de mener une réflexion sur les actions prioritaires en
matière de radioprotection.