Il y a environ un an, le Royaume Uni annonçait sa volonté de continuer dans la voie du nucléaire pour son approvisionnement en électricité. Pour y parvenir, le pays avait décidé de signer un contrat avec EDF. Le géant français de l’électricité construira 2 centrales de type EPR. En échange, le gouvernement garantit un prix d’achat fixe pour le courant qui sortira de ces nouveaux réacteurs. Un prix qui, d’ici à la fin de la construction des EPR, pourrait bien être supérieur à celui de ceux des énergies renouvelables.

Action des militants Greenpeace contre l'EPR, Penly, 2003Il y a environ un an, le Royaume Uni annonçait sa volonté de continuer dans la voie du nucléaire pour son approvisionnement en électricité. Pour y parvenir, le pays avait décidé de signer un contrat avec EDF. Le géant français de l’électricité construira 2 centrales de type EPR. En échange, le gouvernement garantit un prix d’achat fixe pour le courant qui sortira de ces nouveaux réacteurs. Un prix qui, d’ici à la fin de la construction des EPR, pourrait bien être supérieur à celui de ceux des énergies renouvelables.

Cet accord représente en réalité un subventionnement de la production nucléaire par l’état britannique. Or un tel soutien public devait encore recevoir l’aval des autorités européennes. C’est chose faite. La commission européenne donnait ce matin son feu vert pour la réalisation de l’accord entre EDF et le Royaume Uni. Cela signifie que les autorités européennes et britanniques préfèrent subventionner un géant de l’électricité (EDF est le premier distributeur d’électricité de la planète), plutôt que de soutenir l’essor des renouvelables et les nombreuses créations d’emploi qui l’accompagnent. Il s’agit d’un précédent dangereux, qui menace la transition énergétique partout en Europe. Les porteurs de plusieurs projets de construction de nouvelles centrales nucléaire attendaient en effet de connaître l’avis de la Commission avant d’aller de l’avant.

« Cette décision représente une subordination sans précédent au secteur du nucléaire », déclare Andrea Carta, experte judiciaire pour Greenpeace Europe. « Il s’agit d’une telle atteinte aux règles de la concurrence que la commission s’expose elle-même à des poursuites judiciaires. Il n’existe aucunes justifications légales, morales ou environnementales pour transformer l’argent des contribuables en profits pour une entreprise active dans le nucléaire, dont le seul héritage consistera en un monceau de déchets radioactifs. C’est une mauvaise stratégie qui n’a qu’un seul bénéficiaire: EDF »

Le fait qu’EDF ait besoin de telles garanties sur les prix est un nouveau signe démontrant que le nucléaire ne peut exister sans la manne financière publique. Du coté du secteur privé, le nucléaire ne fait plus recette. Fin aout 2014, UBS publiait un document d’information à l’intention de ses clients, dans lequel la banque affirme qu’au regard des nombreuses évolutions en matière de production, de transport et de stockage de l’électricité, le règne de la production électrique réalisée dans de grosses unités centralisées est en passe de se terminer. « D’ici à 2025, tout le monde pourra produire et stocker de l’électricité », déclarent les auteurs du texte. « Ce courant sera vert et compétitif. Il ne sera pas plus cher que celui vendu par les grands services publics, voire même moins. (…) Rejoignez la révolution! »

Ainsi, la plus grande banque de Suisse soutient la transition énergétique et affirme que dans une décennie, les énergies renouvelables seront plus compétitives que les centrales nucléaires et fossiles. Pourtant, les autorités de notre pays font tout pour prolonger la durée de vie des centrales nucléaires existantes. Lors de la dernière session parlementaire, la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national (CEATE-N) proposait une révision de la Loi sur l’énergie nucléaire (LENu) qui autoriserait une exploitation des réacteurs nucléaires jusqu’en 2050, voire au-delà. Hier, l’Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN), apportait, elle aussi, de l’eau au moulin du nucléaire en affirmant que « rien ne s’oppose d’un point de vue purement technique à une exploitation des centrales nucléaires suisses jusqu’à soixante ans. »

Rappelons qu’en Suisse également, le prix de l’électricité nucléaire bénéficie du soutien indirect de l’état. Si les exploitants de centrales devaient prendre une couverture d’assurance réaliste ou alimenter correctement les fonds de désaffectation et de gestion des déchets, leur production serait nettement moins compétitive. « Une limitation fixe de la durée d’exploitation serait une décision politique et devrait être en conséquence prise par le Parlement », peut-on également lire dans le communiqué publié hier par l’IFSN. Une telle décision est indispensable pour protéger la population suisse contre le danger nucléaire et enfin mettre notre pays sur les rails d’une politique énergétique moderne. Il faut que les parlementaires le comprennent rapidement.

Mathias Schlegel est porte-parole de la campagne Climat & Energie de Greenpeace Suisse

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