Syngenta Agro SA souhaitait étendre l’utilisation d’un pesticide contenant du téfluthrine à de nouvelles plantes. Cette mesure aurait permis d’utiliser le produit sur des surfaces plus importantes, augmentant ainsi les risques pour l’environnement. Suite à l’approbation des autorités compétentes sur cette extension, Greenpeace Suisse a saisi le Tribunal fédéral, qui vient de lui donner raison.
La société Syngenta Agro SA*, dont le siège se trouve à Stein, dans le canton d’Argovie, dispose depuis 2012 d’une autorisation pour commercialiser un pesticide contenant du téfluthrine, dont l’utilisation est limitée aux betteraves fourragères et sucrières.
En 2020, les autorités ont autorisé « l’extension du domaine d’utilisation ». Depuis le 1er janvier 2022, l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et de la santé animale (OSAV) est responsable de l’autorisation des pesticides. Auparavant, cette tâche incombait à l’Office fédéral de l’agriculture.
L’objectif de Syngenta est de commercialiser ce pesticide comme produit de traitement des semences pour les céréales, le maïs et la chicorée. Cela correspond à une extension massive du champ d’application et des surfaces agricoles concernées, ce qui implique plus de risques pour l’environnement.
Une évaluation insuffisante des risques
Greenpeace Suisse a fait appel de cette décision devant le Tribunal administratif fédéral, sans succès, et a ensuite saisi le Tribunal fédéral. La plus haute instance judiciaire suisse vient de lui donner raison. Elle estime que l’évaluation des risques des autorités pose problème. L’examen des dangers potentiels de la téfluthrine pour les eaux et les insectes (utiles) est insuffisant.
Avec cette décision, le Tribunal fédéral adresse une sévère réprimande à l’autorité chargée de l’homologation et à Syngenta. Les juges demandent à l’OSAV, en charge du dossier d’homologation, de soumettre la substance active à une évaluation détaillée des risques, en particulier en ce qui concerne ses effets sur les eaux.
Au service de l’agrochimie?
“Le Tribunal fédéral a tranché en faveur de la biodiversité”, commente Iris Menn, directrice de Greenpeace Suisse. “Les autorités en charge des homologations doivent éviter de se faire les complices de l’industrie agrochimique”.
Cette décision de la plus haute instance judiciaire de Suisse met en lumière l’importance du droit de recours des organisations de protection de l’environnement. Comme l’illustre le cas de la téfluthrine, ce droit leur permet de demander à la justice de vérifier si les autorités compétentes appliquent bien le droit en vigueur.
*Selon ses propres informations, Syngenta Agro SA, dont le siège se trouve à Stein (AG), est responsable des activités commerciales liées aux pesticides et aux semences en Suisse. Elle appartient au groupe public chinois Sinochem.
Le droit de recours des organisations
Le droit de recours des organisations permet uniquement d’obtenir le respect de la législation en vigueur. Un recours a pour effet qu’un tribunal peut examiner la légalité de projets particulièrement délicats portant atteinte à la nature. La décision est toujours prise par le tribunal. Si ce dernier rejette un recours, les organisations doivent prendre en charge les frais de procédure. Les organisations désignées par le Conseil fédéral doivent rendre compte chaque année de l’usage diligent qu’elles font du droit de recours. Le droit de recours des organisations existe depuis 1967 et a fait l’objet d‘une révision complète en 2007. En 2008, le peuple suisse l’a confirmé par 66% des voix dans tous les cantons. Sauvés grâce au droit de recours: la région d’Aletsch, les Bolle di Magadino, Lavaux, etc.
Pour en savoir plus : www.voixdelanature.ch
Contact:
Mathias Schlegel, porte-parole, Greenpeace Suisse, +41 79 794 61 23, [email protected]