Fin septembre, le Parlement fédéral a approuvé le « décret d’accélération » dans le cadre de la loi sur l’énergie. Les parlementaires ont donné un élan important à la transition énergétique, mais il vient avec des concessions douloureuses.

Les membres de l’Alliance-Environnement, un regroupement informel des grandes organisations environnementales dont fait partie Greenpeace Suisse, renoncent à un référendum contre le “décret d’accélération”, estimant que l’essor des énergies renouvelables est une priorité vitale. Elles acceptent ce compromis pourtant douloureux à cause des restrictions imposées au droit de recours des organisations. 

Ce qui compte pour les membres de l’Alliance, dont l’expertise et l’engagement sur la question ont largement été démontrés par le passé, c’est de s’assurer d’une transition énergétique rapide et respectueuse de la nature.

Le « décret d’accélération » simplifie et accélère  les procédures de planification, de construction, d’extension et de rénovation des grandes installations de production d’électricité ou de chaleur à partir d’énergies renouvelables. Il répond à la demande de la population. En plébiscitant la loi sur l’électricité en 2024, les Suisse·esses ont fait le choix de donner la priorité à la promotion des énergies renouvelables.

Le droit de recours des organisations

Le “décret d’accélération” couvre notamment seize grands projets hydroélectriques d’importance nationale. Divers groupes d’intérêt issus des milieux économiques, politiques et sociaux ont discuté de ces projets dans le cadre d’une table ronde. Les organisations environnementales ont approuvé les projets, à condition que le droit de recours des associations soit maintenu.

Le droit de recours des associations permet de faire examiner les autorisations accordées pour des projets par un tribunal afin de porter la voix de la nature. Seule une minorité de l’ensemble des projets est concernée. Les décisions sont toujours rendues par un juge. 

Le droit de recours des associations est un instrument important et éprouvé du droit environnemental, qui est utilisé de manière responsable. Entre 2010 et 2023, 795 projets hydrauliques, éoliens ou de biomasse énergie ont été réalisés. Au cours de cette période, il y a eu en moyenne moins de six recours collectifs par an pour garantir le respect du droit applicable pour ces réalisations. Nous avons par exemple récemment utilisé le droit de recours des associations contre un pesticide contenant de la téfluthrine.

Climat et biodiversité: les deux faces d’une même pièce

Les attaques contre le droit de recours des associations se sont multipliées lors des délibérations sur le « décret d’accélération ». Il a finalement été restreint dans le cadre de la construction des 16 grands projets hydroélectriques. Seuls les tribunaux cantonaux disposent désormais de la compétence d’examiner la conformité de ces 16 projets au droit environnemental en vigueur. Un recours au Tribunal fédéral devient impossible. 

De fait, une interprétation uniforme du droit fédéral devient ainsi plus difficile. Dans notre système juridique, même les amendes pour stationnement illicite peuvent être contestées devant le Tribunal fédéral. La protection de la biodiversité et du climat sont mis en opposition alors que les deux jouent un rôle crucial pour atteindre nos objectifs climatiques. 

Les organisations environnementales sont convaincues que les 16 grands projets – et pas seulement ceux-là – peuvent, et doivent,  être réalisés en respectant le droit et la nature. Le respect du cadre légal est une évidence dans un État de droit comme la Suisse.

Le respect de la nature est très important pour un développement efficace des énergies renouvelables et pour s’assurer l’adhésion des habitant·es. De nouvelles restrictions du droit de recours des associations – le seul instrument juridique qui rend audible la voix de la nature – sont inacceptables.

La Suisse veut des énergies renouvelables, pas des réacteurs nucléaires!

Les organisations environnementales ont consenti à ces compromis car nous considérons un essor rapide des énergies renouvelables comme vital. Souvent accusés à tort de nous opposer à ce développement, nous démontrons ainsi au contraire notre engagement en sa faveur. 

C’est maintenant au tour des acteurs du secteur de l’électricité et des autorités compétentes de montrer qu’ils prennent au sérieux les préoccupations et les dispositions relatives à la protection de la nature.

Avec ces modifications de la loi sur l’énergie, la Suisse franchit une nouvelle étape importante dans la transition énergétique. La Suisse peut couvrir tous ses besoins avec un approvisionnement 100 % renouvelable. Le solaire, l’hydraulique et l’éolien sont nos énergies propres. Elles alimentent la Suisse de manière sûre et fiable, et garantissent notre souveraineté énergétique.