La centrale nucléaire de Beznau constitue un grave risque financier pour le groupe Axpo. C’est ce que montre une étude sur la situation financière et les perspectives de ce grand producteur d’électricité. A l’occasion de la publication du résultat annuel du groupe Axpo qui aura lieu demain vendredi 18 décembre 2015, Greenpeace Suisse appelle les Conseillers d’Etat qui siègent au Conseil d’administration d’Axpo à dévoiler les analyses de risques du groupe. Continuer d’exploiter Beznau peut mener Axpo à la faillite.


(01.09.2014) Une centaine de militants Greenpeace protestent à la centrale de Beznau. ©Greenpeace/Balzani-Lööv

(01.09.2014) Une centaine de militants Greenpeace protestent à la centrale de Beznau. ©Greenpeace/Balzani-Lööv

Par le passé, les problèmes économiques d’Axpo ont déjà suscité de sérieuses inquiétudes. Cette année, ces difficultés se concrétisent dans l’absence du versement de dividendes aux cantons suisses qui sont les propriétaires de ce producteur d’électricité. L’étude (en allemand) que publie aujourd’hui l’institut financier néerlandais Profundo mandaté par Greenpeace confirme la situation difficile d’Axpo et montre comment la centrale nucléaire de Beznau menace la santé financière du groupe. « Si Axpo s’entête à vouloir continuer d’exploiter Beznau, cette centrale risque de signer la fin de ce producteur d’électricité, » explique Florian Kasser, spécialiste du nucléaire chez Greenpeace Suisse.

Le réacteur de Beznau 1 est à l’arrêt depuis ce printemps. Des défauts de matériau dans la cuve de pression du réacteur et leur analyse sont la cause de cet arrêt prolongé. C’est pour cela que Beznau 1 ne sera pas redémarré avant juillet 2016. Et la question de fond du redémarrage de ce réacteur pour des raisons de techniques de sécurité reste ouverte, car un redémarrage est de toute façon lié à d’importants risques financiers, comme le montre clairement l’analyse (en allemand) de Greenpeace de l’étude de Profundo.

La production d’un kilowattheure par la centrale de Beznau coûte 7 centimes. Mais Axpo ne peut le revendre qu’à 4 centimes sur le marché de l’électricité. Depuis janvier 2014, Axpo ne peut plus répercuter ses pertes sur ses clients, car elle doit maintenant leur facturer l’électricité au prix du marché. Continuer à exploiter cette centrale est donc de toute façon déficitaire.

Comme l’étude le montre clairement, continuer d’exploiter cette centrale nucléaire ne se justifierait d’un point de vue économique que tant que les prix de vente sont plus élevés que les coûts d’exploitation variables. Tant que c’est le cas, la vente d’électricité couvre au moins une petite partie des coûts fixes et génère une petite marge. « L’exploitation de Beznau ne sert actuellement qu’à réduire un peu le déficit, » ajoute encore Florian Kasser. Mais les perspectives sont plus que troubles.

Les marchés de l’électricité – et Axpo aussi – considèrent que les prix continueront de baisser dans les années à venir. Dans un avenir prévisible, la centrale nucléaire de Beznau ne générera même plus de marge. Continuer l’exploitation génère en outre des coûts additionnels qui affectent encore un peu plus la facture du fait de la nécessité d’investir dans l’entretien et le rééquipement des installations. Les rééquipements ordonnés après l’accident majeur de Fukushima n’ont ainsi pas encore été effectués. Axpo n’indique ces coûts nulle part.

Les pertes générées par Beznau affaiblissent la substance d’Axpo et sa capacité d’innover et d’investir. C’est d’autant plus grave qu’Axpo appartient aux cantons du Nord-Est de la Suisse. « L’évaluation des risques de continuer d’exploiter Beznau ne doit pas être laissée à la seule direction d’Axpo, » dénonce Florian Kasser.

Greenpeace appelle les Conseillers d’Etat qui siègent au Conseil d’administration d’Axpo à présenter les analyses de risques aux Grands Conseils de leurs cantons. Ils doivent en effet être informés avec transparence sur les perspectives et les risques financiers. Il ne faut pas songer à continuer d’exploiter Beznau tant qu’Axpo n’a pas présenté la situation de sa centrale de façon crédible et transparente. C’est valable tant pour les risques économiques que pour la sécurité systémique et technique que Greenpeace a déjà dénoncé à plusieurs reprises par le passé.